Je suis arrivé en France en 1996, j’avais 6 ans. A partir de mes dix-huit ans, j’ai dû aller à la préfecture (file d’attente à partir de 6 heures jusqu’à 17h, fonctionnaires irrespectueux…) tous les trois mois pour renouveler mon titre de séjour. Puis j’ai eu un entretien à l’OFPRA. Et six mois plus tard j’ai reçu un courrier me signifiant que ma demande était rejetée. Je me suis donc retrouvé sans-papiers.
Mme Kergoët, professeur de lettres histoire au lycée, qui est au courant de ma situation, est venue me parler d’une cérémonie de parrainage au conseil régional d’Ile-de-France. Les élus de cette assemblée ont décidé de parrainer chacun un élève sans-papier. J’ai accepté d’emblée et une semaine plus tard, le vendredi 6 mai 2010, nous nous sommes rendus, moi, une autre élève de Daniel Balavoine, M. Montosset, CPE, et Mme Kergoët au Conseil régional à Paris.
Cérémonie de parrainage au conseil régional d’Île-de-France pour une soixante d’élèves sans papiers
L’hémicycle était plein : une soixantaine d’élèves de toutes origines y avaient été rejoint par presque autant d’élus régionaux et de personnalités politiques (telles que Cécile Duflot) et médiatiques (parmi lesquelles Isabelle Giordanno). Il y avait également des comédiens et des artistes d’entre eux, qui ont fait des animations. Les jeunes ont été parrainés les uns après les autres par chacun des élus et certains d’entre eux ont raconté leur histoire.
J’étais ému, surtout j’ai moins peur maintenant
Puis ça a été mon tour. La présidente de la séance m’a appelé, j’ai appuyé sur le bouton, qui était devant moi (chaque place équipée d’un micro et d’un bouton sur lequel on appuie pour prendre la parole). Je suis apparu sur l’écran géant de la salle. Puis, la présidente a appelé M. David Mbanza, conseil régional et conseiller municipal à Bois Colombes. Elle lui a demandé solennellement s’il voulait être mon parrain. Il a répondu « oui, j’accepte » . La salle a applaudi. Toutes les copies des documents de ma démarche de régularisation ont été transmis à M. Mbanza, qui va désormais essayer d’appuyer la procédure pour qu’elle aboutisse. Il m’a donné sa carte de visite et m’a dit qu’en cas de problème avec les autorités, je pouvais l’appeler, « quelle que soit l’heure ». J’étais ému, c’était un bon moment que je n’oublierai pas. Et surtout, j’ai moins peur. Je me sens bien France : j’y suis scolarisé, j’y vis depuis longtemps. Il n’y a aucune raison qu’on m’en expulse !
Anonyme
Article paru dans Bal’actu numéro 3, mai 2011.