Interview du collectif Désarmons-les : « la violence policière est systémique et ne dépend pas des policiers uniquement »

PPL Actus : Qu’apporte le collectif « Désarmons-les » ? Pourquoi a-t-il été créé ?

Le collectif « Désarmons-les » a été fondé en 2012, d’abord pour informer sur les armes utilisées par les forces de l’ordre dans le cadre du maintien de l’ordre, avant d’assister dans leurs combats et épreuves les proches de personnes assassinées par la police en 2013, puis les blessé-es et mutilé-es à partir de 2014.

Où se situe ce collectif ?

Le collectif n’a pas de localisation géographique, ses membres sont dans plusieurs villes. Pour se protéger, il a fait le choix de ne pas s’installer dans un lieu en particulier.

Qui sont les personnes qui ont eu l’idée du collectif « Désarmons-les » ?

Les personnes qui ont eu l’idée du collectif et qui l’ont fondé étaient militants radicaux de longue date (début des années 2000), notamment au sein de collectifs et réseaux opposés aux frontières et à l’enfermement des étrangers, mais aussi de luttes anticapitalistes et écologistes.

Qui a fondé le site « désarmons-les » ? En quelle année le site a été créé ?

Le site internet est juste une interface d’information du collectif vers l’extérieur, il n’est pas un espace d’organisation. Il est en train d’être refait pour intégrer davantage les publications faites sur les réseaux sociaux (Facebook et Twitter notamment). Le site internet et la page Facebook n’ont été créés qu’en 2016.

Peut-on publier ou témoigner un fait sur ce site ?

Ce n’est pas un espace d’open-publishing, c’est à dire que des personnes extérieures au collectif n’y publient pas, pour des raisons de sécurité (les personnes du collectif portent la responsabilité des propos qui sont diffusés sur le site). Le collectif ne publie pas de témoignages, mais seulement des articles d’information sur les faits de violences policières.

« Apporter un soutien juridique, psychologique et politique, voire financier aux personnes mutilées »

En quoi consiste le site « Désarmons-les » ? Quels sont les enjeux ?

Les enjeux du collectif sont divers. Il s’agit à la fois d’apporter un soutien juridique (pour les plaintes), psychologique et politique (action), voir financier (collectes d’argent pour payer les avocats et les frais médicaux) des personnes mutilées. Il s’agit aussi de faire du plaidoyer et de l’information sur les violences d’Etat. On est également intervenus comme témoins de moralité dans des procès, pour pointer l’aspect systématique de ces violences (ce ne sont pas juste des « bavures » ou des exceptions). Enfin, l’objectif politique/idéologique est de dénoncer la fonction de l’institution policière, son rôle social, c’est à dire ce à quoi elle sert vraiment : protéger l’ordre établi, et notamment le système économique capitaliste.

« Le collectif évoque toutes les formes de violences policières : personnes migrantes ou issues de l’immigration, les « jeunes de banlieue », manifestant-es et supporters de football. »

Est-ce-que ce collectif évoque aussi les violences policières subies par le mouvement des gilets jaunes ou d’autres situations ?

Le collectif évoque toutes les formes de violences policières, que ce soit contre les personnes migrantes ou issues de l’immigration, les « jeunes de banlieue », ou contre les manifestant-es et supporters de football.

Comment la police et le gouvernement réagissent concernant ce collectif ?

La police et le gouvernement sont très hostiles envers notre collectif, mais aucune mesure n’a été prise au sommet de l’Etat pour l’interdire ou le dissoudre. Ce sont essentiellement les syndicats policiers qui dénoncent notre combat et nos actions en le qualifiant de « extrêmiste » ou »anti flic », mais juridiquement rien n’a jamais été entrepris, parce que le collectif ne fait a priori rien d’illégal. Pour autant, certains de ses membres ont pu avoir des problèmes individuels (poursuites judiciaires et pressions) lors de contrôles ou d’arrestations lors de manifestations, mais officiellement jamais pour les actions menées au nom du collectif.

« C’est l’institution qui est violente, ses politiques et son système économique »

Est-ce-que ce site pourra aider les forces de l’ordre à être beaucoup moins violentes ?

Le collectif ne peut pas aider les forces de l’ordre à être moins violentes, puisque l’opinion du collectif est que cette violence est systémique et ne dépend pas des policiers uniquement : c’est l’institution qui est violente, ses politiques et son système économique. Les policiers ne font que protéger l’Etat et son système économique. C’est donc le choix politique du collectif de ne pas avoir une approche « réformiste » en essayant de changer la police. Nous pensons qu’elle ne peut pas changer.

Est-ce-que ce collectif durera longtemps ?

Ce collectif existera tant qu’on le laissera exister ou tant que les violences d’Etat existeront. Comme il dépend d’êtres humains avec leurs vies personnelles, il se peut qu’il s’arrête si un jour ses membres ne veulent plus le porter ou s’ils subissent trop de pressions.

Interview réalisée par Gaétan – Mention complémentaire Accueil réception

Article paru dans le numéro 8 de PPL Actus, avril 2020.

Photo du site desarmons.net : Lanceur de Balles de Défense (LBD), un fusil produit par la firme suisse Brüger & Thomet.