On entend beaucoup parler d’émigration, d’exil, dans les médias, mais savons-nous vraiment pourquoi il y a autant de vagues d’émigration, savons-nous ce que ces personnes ressentent ? Partir, s’exiler, émigrer est-il toujours le commencement d’une nouvelle histoire individuelle ?
Pour moi, partir, s’exiler, émigrer c’est commencer une nouvelle histoire que ce soit individuellement ou en groupe. Par exemple, moi, j’ai l’impression d’avoir une nouvelle vie. Il y a six ans, je vivais en Haïti avec ma mère, ma grand-mère, mes tantes et mes cousines. Je ne voyais pas souvent mon père et connaissais à peine sa famille. J’étais heureuse, même si la vie n’était pas facile. Ma mère faisait tout son possible pour me nourrir, acheter mes fournitures, payer l’école, l’uniforme, sans oublier que je suis souvent malade. A Haïti, l’assurance maladie n’existe pas. En juin 2010, quelques mois après le tremblement de terre, ma vie a changé.
J’ai laissé toute ma famille à Haïti pensant partir en vacances
On était samedi, ma mère et moi étions dans la chambre. On se préparait pour aller au mariage de notre cousin. Soudain, ma tante est entrée dans la chambre pour parler à ma mère tout bas. Elles sont sorties de la chambre. Quelques minutes plus tard, ma mère est revenue et m’a annoncé que je n’allais plus au mariage parce que mon père m’attendait à Cap Haïtien, une ville proche et avait envoyé mon oncle me chercher. C’est avec beaucoup de tristesse que j’ai laissé toute ma famille, pensant aller en vacances. Arrivée à Cap Haïtien, mon oncle m’a déposée chez ma tante où mon père logeait. Je ne faisais que pleurer, car ma maman me manquait, tout comme mon environnement, l’odeur, ma famille, mes amis, le bruit. Tout me manquait. En me voyant comme ça, mon père m’a demandé si je voulais rentrer. Je lui dis non le cœur serré, car je me suis dit que je lui ferais de la peine si je disais le contraire. C’est une décision que j’allais beaucoup regretter par la suite…
Je suis partie sans dire au revoir à ma mère
Dans l’après-midi, nous avons pris la route pour la capitale, là où mon père habitait avec sa femme et ma sœur que je n’avais jamais vu auparavant. Dans cette maison c’était l’enfer ! Je détestais ma belle-mère et ma sœur est une petite peste. Le 28 août, nous avons pris l’avion pour la France mon père, ma sœur et moi. Je suis partie sans dire au revoir à ma mère, il faut dire que mon père m’empêchait d’avoir tout type de contacts avec elle. Je suis arrivée en France le 29 août. La France était un pays totalement inconnu pour moi. Je me suis retrouvée sans repères, j’ai eu beaucoup de difficultés à m’adapter, que ce soit à l’école, avec la langue ou la température. Ma famille me manquait, tout comme la chaleur et la nourriture. J’ai pleuré tous les soirs dans mon lit.
Ma vie était devenue fade, c’était la routine. Ma vie en Haïti me manquait.
Mycoeurda – terminale Gestion administration
Article paru dans PPL Actus numéro 3 – décembre 2016/janvier 2017.
Photo : Les forces de l’ONU patrouillent dans les rues de Port-au-Price à Haïti en 2010 – Wikipedia.